Les chatbots Messenger tiennent une place de plus en plus importante dans la façon dont les marques communiquent avec leurs clients. Nous avons donc souhaité en savoir plus sur le fonctionnement et les avantages de ces “agents conversationnels” qui occupent désormais une place à part entière dans la stratégie de communication des entreprises. Pour cela, nous nous sommes entretenus avec Marc-Alban Ponthieu, Regional Product Manager chez Messenger, et Florence Estra, Directrice Marketing Digital chez Air France-KLM.

Cela fait désormais 3 ans que les chatbots ont été lancés sur Messenger et leur succès continue de s’étendre. Aujourd’hui, combien de marques utilisent les chatbots Messenger en France ?

Marc-Alban Ponthieu, regional product manager chez Messenger – Aujourd’hui Messenger représente plus de 1,3 milliard d’utilisateurs actifs chaque mois. Aussi par mois, 20 milliards de messages sont échangés entre ces utilisateurs et les entreprises sur notre plateforme. En France, il y a plus d’un million d’entreprises actives sur Messenger (et 40 millions dans le monde).

Approximativement 300,000 développeurs s’appuient sur la plateforme Messenger. De nombreuses marques françaises sont déjà présentes sur la plateforme avec des cas d’usages plébiscités par les consommateurs : on peut par exemple réserver un billet de train depuis le Oui.Bot de Oui.SNCF ou être au courant des dernières actualités cinémas depuis le bot Allo-Ciné. Un grand nombre d’entreprises du CAC40 ont déjà développés leur bot, soit dans une logique serviciel, soit dans une logique marketing.

Quels sont les avantages majeurs que trouvent les marques à utiliser les chatbots Messenger ?

Marc-Alban Ponthieu, regional product manager chez Messenger – Avec le développement des nouvelles technologies et des réseaux sociaux, les tendances de consommation ont évolué, la relation entre les marques et le consommateur change également. Pour les consommateurs, cela veut dire pouvoir échanger directement avec les marques, obtenir une réponse rapidement ou disposer d’un service client personnalisé accessible 24h/24. Pour les entreprises, cela veut dire être présent sur des plateformes déjà connues et utilisées par leurs clients et ainsi les fidéliser en construisant avec eux une relation forte et durable.

Messenger permet aux entreprises de se connecter avec les internautes sur une plateforme où ils passent déjà du temps naturellement, une dimension plus essentielle que jamais, compte tenu du nombre de sollicitations et de canaux disponibles. Cela aide les entreprises à consolider des relations sur la base des profils individuels, en permettant aux utilisateurs de répondre où et quand ils le souhaitent.

Lancée il y a quelques années, la plateforme Messenger permet aux entreprises d’envoyer des réponses instantanées aux questions fréquentes, d’utiliser des images attractives et des « Call to action », ainsi que du texte. Ces réponses peuvent être automatisées ou rédigées par des humains.

Nous sommes ravis que la plateforme devienne un canal florissant pour les marques, les développeurs et les particuliers afin qu’ils puissent se connecter les uns avec les autres, avec leurs centres d’intérêt.

Vous trouverez ici un lien pour accéder à la dernière vidéo concernant la partie Business de Messenger, faite à l’occasion de la conférence F8.

Quels sont les secteurs d’activité les plus enclins à utiliser les chatbots Messenger ? Comment expliquez-vous cela ?

Marc-Alban Ponthieu, regional product manager chez Messenger – Les bots pour Messenger présentent des résultats avérés et ont un impact sur la manière dont les gens utilisent la plateforme partout dans le monde, chaque jour. On recense plus de 300 000 bots sur la plateforme Messenger, et des marques de renom proposent des expériences sur ce canal.

Les principaux domaines d’activité : un nouveau canal pour le service client principalement dans des secteurs comme le Travel ou l’assurance avec des marques comme Air France, AXA ou SNCF. Un nouveau canal marketing pour des entreprises proposant des produits ou services comme par exemple Carrefour ou Cdiscount

Comment les utilisateurs de Messenger ont-ils accueilli l’arrivée des chatbots ? Les utilisent-ils régulièrement ? Quels en sont leurs usages ?

Marc-Alban Ponthieu, regional product manager chez Messenger – Comme je le disais dans la première question, aujourd’hui 20 milliards de messages sont échangés entre entreprises en particuliers sur Messenger par mois. Messenger est un vrai atout pour les entreprises comme nous l’avons évoqué plus haut. Mais ce nouveau canal de communication est aussi très apprécié des consommateurs qui utilisent Messenger pour communiquer avec les entreprises/marques qu’ils affectionnent.

Grâce aux bots et au système de messagerie instantanée, la relation avec les marques devient plus directe. Le conversationnel enrichit l’expérience client. Le client accède de façon plus simple et rapide à des informations et produits qui lui ressemblent. Il a le sentiment d’être écouté et donc compris. Les entreprises répondent à ses questions de façon instantanée et personnalisée. Nous avons vu une évolution forte depuis 2 ans, passant de 2 milliards de messages échangés par mois en 2017 entre marques et consommateurs à 20 milliards annoncés lors du F8 2019.

Par rapport aux autres pays, quelle est la place de la France dans l’usage des chatbots Messenger ?

Marc-Alban Ponthieu, regional product manager chez Messenger – La France est un pays sur lequel Messenger mise beaucoup. Sachez que les entreprises en France sont tout aussi friandes des bots qu’ailleurs dans le monde et qu’elles ont, elles aussi, bien compris les avantages d’aller chercher le consommateur directement sur une app où il est déjà présent, avec plus d’un million d’entreprises actives sur Messenger en France contre 40 millions dans le monde entier. Nous pouvons comparer ce chiffre au marché UK qui référence un total de 1.6 millions entreprises actives de leur côté chaque mois.

Qu’est-ce qui vous a convaincus de créer votre propre chatbot sur Messenger ? Quels étaient vos objectifs de départ en lançant votre chatbot ? Ces objectifs ont-ils été atteints aujourd’hui et comment ont-ils évolué ?

Florence Estra, Directrice Marketing Digital chez Air France-KLM – Le premier objectif, c’est de répondre aux besoins de personnalisation de nos clients.

La personnalisation correspond à une attente client forte, pour toutes les marques et en particulier pour le voyage (90% des clients du  secteur du voyage  attendent une relation personnalisée avec une marque)… a fortiori vis-à-vis d’une marque Premium comme Air France. Nous estimons que c’est sur ce thème que nous pouvons nous différencier, avoir un avantage concurrentiel !

C’est la pierre angulaire de notre stratégie client qui peut se résumer en 2 mots : « customer intimacy ». Nous voulons être là où sont nos clients et leur offrir un service personnalisé. Etre là où sont nos clients, cela signifie avoir une stratégie omnicanale : le client peut nous contacter sur le canal de son choix, partout dans le monde puisque nous avons une forte présence internationale (+130 marchés). C’est pourquoi nous sommes présents sur 13 plateformes sociales et conversationnelles, globales (Messenger, Twitter) ou plus locales comme WeChat, Kakao Talk ou Line. Nos 220 conseillers répondent à nos clients en 24/7 en français et anglais et dans 7 autres langues. Etre là où sont nos clients, cela passe nécessairement par une présence sur les messageries instantanées, et notamment Messenger avec ses 1,3 Mld d’utilisateurs mensuels. Messenger regroupe maintenant plus de 80 % des messages reçus par Air France de ses clients.

Le 2e objectif : gérer mieux le volume croissant des demandes.

AF est un acteur important du eCommerce : nous sommes présents en ligne sur plus de 130 marchés et générons 4,2 Mds EUR de chiffre d’affaires en ligne, dont la moitié à l’étranger, ce qui fait d’AF le plus gros e-commerçant F. À l’international, 1 billet est vendu chaque seconde sur AF.com !

Chaque jour, AF gère en moyenne 8000 demandes / jour sur les réseaux sociaux. Mais c’est une moyenne qui cache de grandes disparités (en cas de neige à CDG, ça peut atteindre 12000) et qui est en forte croissance d’une année sur l’autre (+77%).  Et dans le même temps, les consommateurs sont de plus en plus impatients et attendent une réponse quasi en temps réel ! 88 % des clients estiment qu’une réponse rapide accroît leur fidélité à une marque.

Etre sur une messagerie instantanée comme Messenger, c’est l’opportunité de pouvoir y intégrer facilement des chatbots, qui permettent de gérer le volume de messages et de répondre aux besoins d’instantanéité de nos clients. C’est la stratégie choisie avec notre chat bot Louis, qui répond à de nombreuses questions en temps réel (bagages, mot de passe Flying Blue etc…). L’humain, le conseiller, est toujours là et à tout moment peut reprendre la main. L’humain reste au cœur de la relation clients. C’est bien cette approche humain + IA qui est au cœur de notre stratégie.

Le chatbot, c’est le 1er niveau d’intention pour répondre aux besoins d’instantanéité des clients et laisser nos 220 conseillers media sociaux, présents partout dans le monde, répondre aux questions les plus complexes ou se concentrer sur les moments clefs de la relation clients.

Nos indicateurs sont donc naturellement orientés vers la satisfaction clients : dans un contexte de forte croissance, nous avons réussi le challenge de battre des records de satisfaction clients, et avons augmenté notre NPS de plus de 10 points depuis la mise en place de cette combinaison entre relation attentionnée de nos agents et intelligence artificielle.

Quelle place accordez-vous aux chatbots dans votre stratégie de communication et dans vos actions marketing ?

Florence Estra, Directrice Marketing Digital chez Air France-KLMLe conversationnel est devenu un pilier important de notre stratégie. Messenger est aujourd’hui le premier canal de relation client digital avec nos clients sur les médias sociaux. Le parti pris n’est pas marketing à ce stade, mais bien de la relation clients : les études et workshops que nous avons menés avec nos clients démontrent un vrai besoin d’accompagnement et d’instantanéité, notamment dans la phase de préparation de leur voyage. Louis et Lucie sont donc positionnés comme des conseillers virtuels, en support de nos 220 conseillers à travers le monde, qui peuvent ainsi se concentrer sur les cas les plus complexes.

Aujourd’hui, Air France a mis en place différents chatbots. Quel est le rôle précis de chacun ?

Florence Estra, Directrice Marketing Digital chez Air France-KLMUn chiffre clé à avoir en tête : 88% des clients estiment qu’obtenir une réponse instantanée accroît leur fidélité à une marque. C’est le point de départ de la conception de notre Chat Louis, avec comme premier cas d’usage les bagages  : avoir un assistant virtuel qui répond instantanément aux clients sur leurs questions relatives aux bagages. Et pourquoi les bagages ? Parce que c’est la thématique qui génère le plus de questions de nos clients sur les réseaux sociaux, et dans les centres d’appels. Nous avons choisi le meilleur cas d’usage en écoutant nos clients. (Leurs questions : Comment transporter mes skis ? Ma planche de surf ? Ma poussette ?)
Aujourd’hui, Louis a grandi : il traite tous types de questions et notamment celles liées aux identifiants Flying Blue : cette automatisation a apporté un gain de temps considérable pour nos conseillers (temps de réponse divisé par 2 dès le premier mois d’implémentation).

Le client peut, à tout moment, rentrer en contact avec un conseiller s’il le souhaite, ce qui est pour nous un facteur clef de succès du chat bot. Cel-a n’arrive que dans 6% des cas, ce qui montre que Louis répond de façon satisfaisante la plupart du temps.
Le conseiller a accès à l’historique de la conversation, aux données utiles du client et pourra répondre de façon pertinente au client.

Louis notre chat Bot, c’est le  premier niveau d’assistance, permet de concentrer les conseillers sur des questions plus complexes.

Ensuite il y a sa petite soeur, Lucie, lancée au printemps 2017

Cette fois c’est un autre constat qui a orienté la stratégie : 80% des personnes qui préparent leurs vacances ont besoin d’être inspirées pour choisir leur prochaine destination.

Nous avons une mine d’or de contenu qualitatif grâce notre guide de voyage Travel by Air France. Nous avons développé en interne des API pour envoyer ce contenu vers un bot « inspirationnel ». Le client interagit avec Lucie via des emojis.

Le client est inspiré pour son voyage avec Lucie, est orienté vers le moteur de réservation, reçoit sa confirmation de réservation sur Messenger, la veille sa carte d’accès à bord, le jour J la notification de sa porte d’embarquement ou son tapis bag, et peut interagir avec un chat bot ou un conseiller tout au long de son parcours

De l’inspiration au voyage et à l’après-vente, chat bots et conseillers accompagnent nos clients tout au long de leur parcours avec Air France !

Si les chatbots ne sont pas en mesure de répondre aux questions d’un client, comment se passe la relève avec un agent humain ?

Florence Estra, Directrice Marketing Digital chez Air France-KLMNous avons pris le parti de ne pas cacher le bot au client : il est clairement identifié avec un avatar et un surtitre dans le déroulé de la conversation. Le client doit savoir qu’on a développé ce chatbot pour lui mais que nous sommes conscients que, à contrario de ce qu’Air France veut être, il est faillible et c’est pourquoi un conseiller peut prendre la relève à tout moment.

Concrètement, il y a deux cas de figure :

– La question devient trop complexe pour le Bot, il propose de lui-même de passer le relai à un conseiller. Un conseiller est alerté et la conversation reprend avec un autre avatar qui marque bien le changement.

– Le client le demande de lui-même, via un bouton dédié à poursuivre avec un conseiller

Comment se déroule l’expérience utilisateur avec vos chatbots ? Pouvez-vous nous décrire l’arborescence complète et simplifiée d’une expérience utilisateur ?

Florence Estra, Directrice Marketing Digital chez Air France-KLMAujourd’hui Louis est un metabot  : il redirige vers des « skills » spécifiques en fonction de la reconnaissance du cas (bagage, Flying Blue, suivi de réservation…). Il détecte le sujet dans la question du client grâce à une reconnaissance du langage (NLP) développée en interne. C’est totalement transparent pour le client car toute l’expérience est automatisée.

Beaucoup de personnes craignent d’ailleurs que les chatbots ne menacent les postes de nombreux employés. Que pouvez-vous répondre à cela ? Pouvez-vous nous communiquer certains chiffres et DATA qui pourraient appuyer vos propos ?

Florence Estra, Directrice Marketing Digital chez Air France-KLMLe constat est partagé par tous : le volume de messages que nous traitons, la croissance exponentielle des conversations, la nécessité d’améliorer sans cesse notre temps de réponse : il devenait indispensable de trouver une solution. La réponse des chatbots n’a en rien été imposée, cela a été le fruit de réflexions communes avec nos conseillers. Ils ont été impliqués dans toutes les phases d’implémentation et se réjouissent de tous les bénéfices que cette complémentarité de leur travail avec l’intelligence artificielle apporte. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : dans un contexte de croissance de +80% des messages entrants, nous avons amélioré notre satisfaction clients de 10 points depuis que nous avons mis en place cette combinaison.

Ils ont également été à l’origine de la mise en place d’un outil qui leur est dédié et qui s’appuie sur l’intelligence artificielle. Cette dernière détecte l’intention dans la question du client et propose une réponse adaptée au conseiller. Libre à lui ensuite de la donner ou non au client.

Tout ceci mis bout à bout, c’est ainsi plus de la moitié (56%) de nos conversations avec nos clients sur les réseaux sociaux qui sont traitées avec l’aide de l’intelligence artificielle. Soulignons que l’expérience de nos conseillers a été sollicitée à toutes les étapes : définir les réponses, entrainer les bots, affiner, trouver le ton juste pour être à la hauteur de notre discours de marque …De nouvelles expertises ont même vu le jour avec des spécialistes UX du conversationnel, des copywriters qui élargissent leurs compétences, des product owners dédiés. Cette complémentarité est essentielle, c’est même un facteur clé de succès.